Projet EBO-SURSY

L’approche « Une seule santé » appliquée à tous les niveaux du réseau de surveillance de la faune sauvage

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Mamadou Barry, champion du Projet EBO-SURSY, forme les écogardes guinéens en s’appuyant sur les outils « Une seule santé » du Projet

Le téléphone peut sonner à tout moment, Mamadou Barry, chargé de la gestion des données au sein de l’Office guinéen des parcs et réserves (OGUIPAR), sait d’expérience que les nouvelles qui vont lui être communiquées ne sont pas bonnes. Cette fois-ci, l’appel concerne un groupe de babouins et de singes rouges (ou patas) retrouvés morts dans l’enceinte d’un parc naturel. Mamadou doit réagir rapidement et diligenter une enquête sur la faune sauvage afin que la cause de cette mortalité soit élucidée. Il peut s’agir d’un début de foyer de maladie animale ; or savoir reconnaître l’apparition d’un foyer fait partie des attributions de Mamadou dans le cadre de son travail de collecte de données sur la faune sauvage de Guinée.

Figure 1. Parc national du Moyen-Bafing en Guinée © OGUIPAR/M. Barry

La menace du franchissement de la barrière des espèces

Lorsque des écogardes découvrent, dans une zone protégée, un groupe d’animaux morts ou malades, l’enquête va chercher à en déterminer la cause parmi diverses possibilités : braconniers ? pesticides ? virus mortel ? Mamadou prend part à l’enquête en examinant les notifications de mortalité animale destinées aux réseaux nationaux de surveillance de l’environnement. Il y recherche minutieusement le moindre indice épidémiologique évocateur de l’apparition d’une maladie chez une ou plusieurs espèces animales. Une maladie apparue chez des animaux est parfois susceptible de franchir la barrière d’espèces et d’atteindre l’être humain. Le succès de ces missions d’investigation repose sur les compétences de nombreux professionnels tout au long de la chaîne de surveillance de la faune sauvage – écogardes des parcs et réserves, Services vétérinaires nationaux, épidémiologistes, personnel chargé de la gestion des données à l’échelle nationale, entre autres –, chaque métier nécessitant une formation spécifique et une actualisation des compétences.

 

Promotion de l’approche « Une seule santé » dans la chaîne de surveillance

Le projet EBO-SURSY, piloté par l’OIE, a pour but de promouvoir et valoriser la surveillance de la faune sauvage et de répondre à cette nécessité de réaliser des formations pour renforcer les capacités des spécialistes de la santé animale, humaine et environnementale. Parce qu’il fait intervenir des professionnels comme Mamadou, le projet EBO-SURSY aide ces spécialistes à maintenir des capacités pointues dans leur domaine tout en mettant en avant le concept intégral « Une seule santé ». L’approche « Une seule santé » repose sur la prise en compte des interconnexions et de l’interdépendance entre les humains, les animaux et les écosystèmes. La santé de la planète et la santé animale jouent un rôle déterminant pour la santé humaine, comme en témoigne le fait que, d’après les estimations, 60 % des maladies infectieuses humaines existantes sont d’origine zoonotique et au moins 75 % des maladies infectieuses émergentes émanent d’une source animale.

En octobre 2019, le Projet EBO-SURSY et ses partenaires, l’Institut de recherche pour le développement (IRD), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) et l’Institut Pasteur, ont mis la thématique « Une seule santé » au cœur d’un programme de renforcement des compétences en Guinée. Ce programme était axé sur la surveillance de la maladie à virus Ebola et d’autres fièvres hémorragiques virales, avec la mise en application de l’approche « Une seule santé » pour renforcer les activités de prévention, de détection et de contrôle des zoonoses émergentes. Des professionnels situés à tous les maillons de la chaîne de surveillance ont participé à cette formation, y compris Mamadou Barry qui a suivi un module sur l’écologie des zoonoses afin de compléter ses connaissances découlant des interactions qu’il a avec la faune sauvage dans le cadre de son métier. Il a participé, aux côtés des Services vétérinaires nationaux, à un exercice pratique organisé par le CIRAD concernant la collecte de prélèvements chez les chauves-souris pour le dépistage de plusieurs virus dont le virus Ebola. Ses supérieurs hiérarchiques au sein du ministère de l’Environnement ont vu en lui un candidat idéal pour cette formation puisque c’est lui qui supervise la saisie des données relatives à la faune sauvage dans la plateforme nationale « Une seule santé » de la Guinée.

Figure 2. Mamadou Barry (à gauche) lors de la formation « Une seule santé » du Projet EBO-SURSY en Guinée (2019). Il travaille avec d’autres professionnels des secteurs de la santé animale, de la santé humaine et de la santé environnementale. ©OIE/S. Muset

 

Un champion au service de la faune sauvage

Après cette session de formation organisée dans le cadre du Projet EBO-SURSY, Mamadou a continué à se perfectionner. S’employant à renforcer les fondements de la surveillance de la faune sauvage en Guinée, Mamadou a cherché à améliorer le système depuis son poste dans le secteur de l’environnement. Il a recensé des collègues qui travaillent directement avec la faune sauvage dans les parcs naturels et les zones protégées, notamment des agents des services forestiers guinéens et des écogardes, pour les initier aux différents concepts que sont l’approche « Une seule santé », l’écologie des virus ou encore la prévention des zoonoses. En s’appuyant sur le support visuel que sont les fiches techniques du projet EBO-SURSY, il a aidé ses collègues à reconnaître les signes de la fièvre de Lassa et les maladies à virus Ebola et Marburg et à se familiariser avec les principes de l’écologie de la transmission de ces virus.

Mamadou a constaté sur le terrain « un besoin crucial de formations de base dans des domaines comme l’épidémiologie et l’écologie de la santé », ajoutant que « de nombreux écogardes savent bien identifier les différentes espèces animales mais ne savent pas repérer leurs maladies et ne connaissent pas les organisations de santé publique en charge de la prévention des foyers ». En 2019, un total de 120 écogardes de cinq zones protégées ont bénéficié des formations imparties par Mamadou. En 2020, malgré les difficultés liées à la pandémie de COVID-19, il a formé 90 autres écogardes dans quatre zones protégées, dans le respect des consignes de distanciation sociale. De son point de vue, le renforcement des compétences de ces personnes est d’une importance capitale car « leur rôle dans la détection précoce des zoonoses est essentiel pour que les systèmes de santé animale et de santé humaine puissent déclencher une riposte rapide et efficace ».

Ayant enquêté sur la mort des babouins et des singes rouges, Mamadou a appris qu’elle était due à de l’eau polluée par des activités minières à proximité. Ce fait est malheureux, mais apporte toutefois l’information rassurante qu’il ne s’agissait pas d’un foyer de maladie actif. En Guinée comme dans tous les pays, des collaborations intersectorielles « Une seule santé » doivent être mises en place afin de mieux protéger les animaux et l’environnement. Pour sa part, Mamadou continuera à œuvrer pour l’instruction et la formation des écogardes et à enquêter sur toutes les notifications de mortalité animale suspecte destinées aux plateformes de surveillance. Quant au projet EBO-SURSY, il entend poursuivre le renforcement des capacités professionnelles à tous les niveaux du réseau de surveillance, dans l’espoir d’inspirer et d’encourager d’autres champions « Une seule santé » comme Mamadou.

Figure 3. Mamadou dispense une formation auprès d’écogardes et de gestionnaires de la faune sauvage travaillant dans des réserves naturelles ou autres sites riches en biodiversité, à Kindia (Guinée) en juillet 2020.

EN SAVOIR PLUS: visitez le site web du projet EBO-SURSY

Avec le soutien financier de l’Union européenne, le Projet EBO-SURSY, mené par l’OIE en coordination avec le CIRAD, l’IRD et l’Institut Pasteur, vise à renforcer la capacité des Services vétérinaires nationaux dans dix pays d’Afrique de l’Ouest et centrale afin de surveiller toute apparition de la maladie à virus Ebola et de quatre autres fièvres hémorragiques virales, à savoir la maladie à virus de Marburg, la fièvre de la vallée du Rift, la fièvre hémorragique de Crimée-Congo et la fièvre de Lassa, et agir en conséquence.  Ces cinq maladies sont des zoonoses ou des maladies capables de se propager des animaux aux hommes.