Vous avez peut-être déjà entendu parler de développement de la main-d’œuvre vétérinaire, également appelé développement des équipes vétérinaires dans certains pays. Mais qu’est-ce que tout cela signifie ? Ce concept repose sur la prise de conscience que toutes les interventions vétérinaires ne nécessitent pas les aptitudes et les compétences d’un vétérinaire ; de nombreuses interventions diagnostiques, chirurgicales et médicales peuvent être confiées à des para-professionnels vétérinaires ou PPV, travaillant sous la supervision de vétérinaires qualifiés et certifiés par l’Ordre (vétérinaire).
Il ne s’agit pas seulement d’un choix, mais très souvent aussi d’une nécessité, compte tenu du coût de la formation d’un(e) vétérinaire et de la rareté (relative) de ces diplômés universitaires sur le marché, qu’il s’agisse du secteur public ou privé.
Dans de nombreux pays, le développement, la reconnaissance et le déploiement de différentes catégories de PPV, travaillant à titres différents, dans des circonstances variées, peuvent être un moyen approprié et rentable pour ces pays de rationaliser la main-d’œuvre de leurs services vétérinaires nationaux, tant dans le secteur public que dans le secteur privé.
L’OIE définit un para-professionnel vétérinaire comme une “une personne qui, en application des dispositions prévues par le Code terrestre, est habilitée par l’organisme statutaire vétérinaire à exécuter, sur le territoire d’un pays, certaines tâches qui lui sont confiées (qui dépendent de la catégorie de para-professionnels vétérinaires à laquelle cette personne appartient), sous la responsabilité et la supervision d’un vétérinaire. Les tâches qui peuvent être confiées à chaque catégorie de para-professionnels vétérinaires doivent être définies par l’organisme statutaire vétérinaire en fonction des qualifications et de la formation des personnes concernées et selon les besoins”.
Sur la base de cette définition, de nombreuses catégories de professionnels vétérinaires ou de santé animale peuvent être qualifiées comme PPV. Pensons aux inspecteurs des viandes dans les abattoirs, aux techniciens des laboratoires vétérinaires, aux assistants de santé animale dans les postes de terrain, aux infirmiers dans les cabinets vétérinaires, aux vaccinateurs dans l’industrie avicole, aux inséminateurs artificiels dans l’industrie laitière, etc… La plupart de ces PPV possèdent des qualifications allant de un à trois ans de formation formelle, selon le cadre réglementaire des pays.
Dans certains pays, cette définition s’étend également aux agents communautaires de santé animale ou ACSA, c’est-à-dire des éleveurs-volontaires qui sont au service d’autres éleveurs de leur communauté, maitrisant un nombre limité de compétences, acquises grâce à quelques semaines ou mois de formation (souvent informelle).
Idéalement, une équipe vétérinaire représentera une pyramide dans laquelle un vétérinaire supervisera un certain nombre de PPV de niveau intermédiaire (par exemple, les inspecteurs des viandes dans un abattoir) et (directement ou indirectement) un plus grand nombre de PPV de niveau de base (par exemple, les inspecteurs des viandes dans des aires d’abattage et sur les marchés à bestiaux).
Un vétérinaire est le garant de la pyramide, il veille à ce que le travail soit effectué conformément aux normes applicables et il est appelé à intervenir dans les cas qui nécessitent son expertise ou l’administration de médicaments à usage restreint.
Ce partage des responsabilités (ou subsidiarité – commencer par confier des questions à l’autorité compétente la plus petite, la plus basse ou la moins centralisée) n’est pas seulement bon pour l’emploi et l’étalement des soins vétérinaires dans les zones rurales, il est également essentiel afin de pouvoir faire face à des ambitions importantes telles que l’éradication de la peste des petits ruminants (PPR) d’ici 2030, une entreprise qui nécessite une vaccination de masse à hauteur de quelque 800 millions d’ovins et de caprins rien qu’en Afrique ; un objectif difficilement réalisable que par des vétérinaires.
Interview avec la Directrice Générale Adjointe (à l’époque), la Dre Monique Eloit (GALVmed, octobre 2015).
Depuis que l’OIE a organisé la première conférence continentale sur le rôle des para-professionnels vétérinaires en octobre 2015 (Pretoria, Afrique du Sud), plusieurs étapes ont été franchies, pour n’en citer que quelques-unes :
Avec ces outils désormais en place, l’OIE s’engage dès à présent à aider les pays à rendre ces recommandations et lignes directrices opérationnelles. Cela implique d’entreprendre le développement d’outils plus précis pour l’évaluation de la main-d’œuvre vétérinaire, de reconnaître les lacunes et d’être ouvert à diverses solutions tout en restant conscient de la nécessité de maintenir des normes qui garantissent la qualité du travail effectué et la préservation de la sécurité sanitaire publique. Cela signifie également qu’il faut s’assurer que les éléments clés d’un environnement favorable sont en place pour fournir un statut juridique clair, une réglementation complète, une formation appropriée et une intégration efficace de toutes les catégories reconnues de personnel vétérinaire.
A travers l’Afrique, trois initiatives sont actuellement en cours pour étudier la situation actuelle des para-professionnels vétérinaires, leur nombre, leur statut juridique, leurs aires d’intervention (secteur public et privé), leur formation et les lacunes ou insuffisances existantes pour répondre aux attentes d’une future politique d’emploi vétérinaire.
En Afrique de l’Ouest francophone, le Projet de professionnalisation des para-professionnels vétérinaires (P3V), soutenu par l’Agence Française de Développement (AFD), se concentre sur deux pays pilotes, à savoir le Sénégal et le Togo.
Ce projet permettra de :
En Afrique orientale et australe, le Projet pour la prévention et la maitrise des maladies animales transfrontalières au profit des petits exploitants (PC-TAD), soutenu par le Ministère Allemand de la coopération économique et du développement (BMZ), se concentre également sur quelques pays pilotes, qui doivent encore être sélectionnés sur la base d’une étude de faisabilité, actuellement en cours, alors que le projet devrait également bénéficier à tous les pays grâce à des activités de sensibilisation et de renforcement des capacités au niveau régional. Dans ces quelques pays pilotes, l’objectif est de démontrer la faisabilité technique de l’éradication de la PPR par le renforcement ou la constitution d’une main-d’œuvre vétérinaire, tout en augmentant la capacité de prévention et de lutte contre la maladie, notamment par la vaccination.
Une troisième initiative de l’OIE intitulée “Renforcement des compétences des para-professionnels vétérinaires” est soutenue par les États-Unis et a une portée mondiale. Le projet vise à promouvoir la mise en œuvre des lignes directrices de l’OIE sur les compétences des para-professionnels vétérinaires et des lignes directrices de l’OIE sur les programmes d’enseignement des para-professionnels vétérinaires.
Le projet vise également à familiariser les partenaires et les parties prenantes avec le contenu et l’application des lignes directrices et à encourager les pays à créer – avec le soutien de l’OIE- un environnement favorable aux PPV au niveau national.
Grâce à une série d’ateliers sous-régionaux en Europe de l’Est, en Asie du Sud et du Sud-Est et en Afrique subsaharienne, l’initiative sensibilisera aux facteurs de réussite d’un environnement favorable aux PPV et aux outils de l’OIE disponibles pour aider ses pays membres. Grâce à des efforts nationaux, l’initiative travaillera également avec les Services Vétérinaires nationaux pour établir un état des lieux concernant les PPV et identifier et hiérarchiser les principales lacunes et les principaux obstacles à un environnement favorable à l’exercice des PPV ; le tout sera suivi par l’élaboration d’un plan de travail national pour s’attaquer à ces lacunes et obstacles prioritaires avec des points de progrès bien identifiables.
Pour de plus amples informations, veuillez contacter Sonia Fèvre